La recrudescence de la covid-19 en chine : vers une nouvelle vague planétaire de contamination ?
Dr. Léo Gaël ATANGA ONDOA
Chercheur Internationaliste
Depuis la levée en décembre dernier des contraintes sanitaires mises en œuvre en mars 2020, la Chine enregistre une flambée d’infections et de décès due au Covid-19. Cette nouvelle dynamique de contamination dans l’épicentre de la pandémie appelle à la vigilance même si les répercussions dans le monde seraient relatives.
En début décembre 2022, les autorités chinoises mettent un terme à la politique zéro Covid-19 en vigueur dans le pays depuis mars 2020. Il était alors question d’arrêter avec un ensemble de restrictions sanitaires draconiennes telles que le confinement de milliers de personnes en cas de dépistage positif au SARS-CoV-2, les dépistages aléatoires obligatoires, les limitations de déplacement à l’intérieur et en dehors du pays pour toute personne transitant par la Chine…
La fin des restrictions sanitaires
La levée des contraintes sanitaires a un lien non négligeable avec la tenue à l’automne 2022 du congrès du parti communiste chinois qui s’est soldé par la réélection de Xi Jinping, à sa tête pour un troisième mandat. Entamant un autre mandat, il fallait un nouveau tournant au président Xi Jinping, ce d’autant plus que des défis actuels l’attendent. De plus, c’était un moyen déterminant pour faire face à la forte pression de la rue et aux diverses protestations mettant en cause le parti communiste. En outre, l’urgence de la relance de la consommation s’imposait au regard de l’asphyxie de l’économie depuis trois ans. L’annonce de la fin de la stratégie « zéro covid » intervient cependant dans un contexte où la Chine fait face à un rebond épidémique. Les rayons de pharmacies se vident, les salles d’hôpitaux se remplissent et on assiste à un engorgement des crématoriums. Le nombre réel d’infections au Covid et de décès liés à ces infections est jusque-là inconnu car les autorités ont cessé de publier les données exactes. Seuls les décès causés par une pneumonie ou une insuffisance respiratoire sont classés parmi les décès dû à la Covid-19. Toutefois Sun Yang, le directeur adjoint du Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies indique qu’au cours des vingt premiers jours de décembre, près de 250 millions de personnes (environ 18% de la population) ont été infectées. On dénombrait au 12 janvier environ 60.000 morts.
Comprendre la recrudescence
Avec l’explosion des cas de Covid-19 en Chine, une perception populaire établissant la corrélation entre la vague actuelle d’infections et la levée des restrictions s’est largement répandue. Pourtant, d’après l’épidémiologiste Paul Hunter, cela n’est pas tout à fait vrai. En effet, l’arrêt de la politique zéro covid intervient trop longtemps après la vaccination massive de la population. D’un point de vue scientifique, l’immunité conférée par les vaccins diminue dans les mois qui suivent l’injection. 8 mois après la vaccination, une grande partie de la protection contre l’infection est perdue. Même si la protection contre les formes graves de la maladie semble plus durable, elle s’amenuise également. La campagne de vaccination de la Chine s’acheva dans la grande majorité en février 2022. En référence à cette date, l’effet protecteur contre l’infection aurait largement disparu à l’automne. Pareillement pour la protection contre les formes graves qui auraient largement diminué. L’expérience de la Nouvelle-Zélande corrobore cette hypothèse. Ayant décidé de mettre un terme à sa politique zéro-covid à l’issue de sa campagne de vaccination, le pays s’est vu faire face à une forte recrudescence des infections au moment de la réouverture des frontières. Par ailleurs, en dépit de la vaste campagne de vaccination, les populations chinoises n’ont pas développé l’immunité naturelle ou collective. Une situation qui les maintient dans une posture vulnérable face à la maladie. De même, le taux de vaccination des personnes âgées en Chine demeure inférieur à celui des jeunes. Ceci contribue à l’augmentation des formes graves de la maladie sans oublier l’accroissement du nombre de décès liés aux infections.
La position de l’Organisation Mondiale de la Santé
L’OMS, à travers son Directeur Général M. Tedros Abdhanom Ghebreyesus, a exhorté la Chine à partager ses données sur la gravité de la maladie, les hospitalisations enregistrées et la capacité de ses unités de soins intensifs. L’organisation onusienne a indiqué qu’elle continuerait à soutenir la Chine à concentrer ses efforts sur la vaccination des personnes les plus exposées sur l’ensemble du territoire. Mike Ryan, directeur du programme d’urgence de l’OMS a affirmé que l’organisation demanderait instamment à la Chine d’importer les vaccins étrangers à ARNm à l’instar de Moderna et BioNTech dont l’efficacité parait plus avérée contre le SARS-CoV-2. Cette incitation fait suite aux insuffisances des vaccins chinois Sinovac et Sinopharm qui se révèlent plus efficients pour bloquer la diffusion de la maladie mais présentent des limites lorsqu’il s’agit de traiter les infections graves du virus.
Quels risques pour le reste du monde ?
La recrudescence de la Covid-19 en Chine ne représente pas un risque majeur pouvant conduire à de nouvelles vagues de contamination planétaire. Contrairement à la Chine, le SARS-Cov-2 a largement circulé dans les autres parties du monde, favorisant ainsi le développement de l’immunité collective et un degré de protection élevée des populations contre les formes graves du virus. A cela s’ajoute la vaccination massive des populations (majoritairement dans l’espace occidental) aux vaccins ARNm avérés très efficaces. Au surplus, l’application par de nombreux pays à travers une approche stricte de contrôle sanitaire de par l’exigence d’un test négatif à l’embarquement en Chine et même à l’arrivée à l’endroit des voyageurs en provenance de l’empire du milieu s’inscrit dans le registre des mesures susceptibles de contenir une nouvelle vague de contamination planétaire.
