Covid 19 : quelques mots – boussoles pour nous orienter face à la crise

Covid 19 : quelques mots – boussoles pour nous orienter face à  la crise

Par Franck ESSI

Economiste – Secrétaire Général du Cameroon People’s Party


Il semble que cette crise du coronavirus (Covid-19) nous plonge clairement en terre inconnue. Une terre d’incertitudes.

En effet, l’incertitude est partout. Elle étend son empire sur les origines de ce virus, la durée de cette crise, les moyens de traitement et sur les vaccins pour s’en prémunir.

Les pays développés comme les pays dits sous-développés sont dans le tâtonnement.

Certes, tous ne tâtonnent pas de la même manière.

Certes, certains tâtonnent de manière plus intelligente et plus « efficace » que d’autres. Mais à la fin, le constat est le même partout : tous tâtonnent.

Tous révèlent, à des échelles diverses et dans des proportions différentes, leurs niveaux d’impréparation ainsi que les limites des différents systèmes sanitaires et processus de gestion des crises existants.

Pour un pays comme le Cameroun, gouverné comme on le sait, la situation est plus qu’inquiétante. Nul besoin de disserter sur ce qui adviendra. C’est certain que ce sera difficile. Voire catastrophique.

La vraie question, selon moi, est la suivante : Que pouvons-nous ou que devons-nous faire pour minimiser les dommages, surmonter cette crise et rebondir plus forts qu’avant ?

Question qui appelle différents types de réponses, à la fois politiques et techniques.

Ce ne sera pas l’objet de mon propos.

Je voudrais plutôt insister sur notre attitude globale, notre philosophie générale de gestion de la crise, nos grandes orientations en cette période de tempête.

Je voudrais me rappeler et nous rappeler à tous.es, des mesures et réflexes de bon sens qui, malheureusement, ne sont pas pratiques communes.

Pour commencer…

 

  • Anticiper et refuser de subir.

Il n’y a pas de vents favorables pour celui qui n’a pas de cap. Dans une guerre ou un combat, celui ou celle qui n’envisage pas la victoire a déjà perdu.

Pour ne pas partir perdants et se donner les moyens de faire face, nous devons nous poser les questions suivantes :

– Dans le meilleur comme dans le pire des cas, qu’est ce qui risque de se passer ?

– Quelles sont les forces et faiblesses de ma famille, de mon entreprise, de mon pays face à cette crise ?

– Quelles sont les mesures, les actions ou les dispositions à prendre à tous ces niveaux pour faire face ?

– Que faut – il faire maintenant et urgemment pour éviter la catastrophe annoncée de demain et d’après – demain ?

– Qu’est-ce que je dois faire de manière globale pour m’en sortir ?

En termes simples, il nous faut un plan. Ces questions nous permettent, à l’échelle individuelle comme collective, d’en élaborer un. Un plan pour faire face aux situations prévisibles ou inexorables qui se profilent.

Le plan, c’est notre moyen d’affronter les incertitudes. Le plan, c’est un vaccin contre le fatalisme. Car au fond, il n’y a pas de vents contraires pour celui qui sait là où il va.

Quel est notre plan ?

 

2- Faire le maximum avec les ressources dont nous disposons.

Fort de cette analyse approfondie de la situation et du plan global qui en découle, il est absolument nécessaire de se poser les questions suivantes tout au long de la gestion de la crise :

– Sommes – nous en train de faire le maximum avec les ressources dont nous disposons ?

– Sommes – nous entrain de mobiliser au maximum les ressources que nous avons ?

– Sommes – nous en train d’avoir le meilleur usage possible de nos ressources ?

Au niveau individuel comme collectif, il est clair que nous n’avons pas toujours les ressources souhaitées.

Mais ce qui reste à notre portée, c’est notre intelligence et notre capacité à l’orienter pour faire le maximum tous les jours et dans toutes les situations.

A la faveur de cette crise du Covid 19, nous avons l’opportunité d’être efficaces et efficients dans la mobilisation et la gestion des ressources matérielles, humaines et financières. Et celles – ci, sans être suffisantes, ne sont pas négligeables.

Ne dit – on pas que nécessité fait loi et que l’union fait la force ?

 

3- Faire des sacrifices

On ne sortira pas d’une crise pareille sans faire des sacrifices. Nous devons en être conscients.

Nous allons sacrifier nos libertés d’aller et venir, de nous rassembler et de nous amuser.

Nous allons sacrifier notre confort de vie. Par les multiples restrictions que nous devons et allons-nous imposer, il est clair que notre confort matériel en prendra un coup. On ne vit pas de la même façon en temps de paix qu’en temps de guerre.

Nous allons certainement, en fonction de la durée de cette crise, si nous voulons vivre au – delà, passer en mode rationnement.

Le maitre mot sera, me semble – t – il, ECONOMIE. Economie comprise comme la science de gestion de la rareté. Economie comme l’art d’allouer de manière optimale les ressources limitées dont nous disposons pour satisfaire des besoins qui eux sont illimités.

Le maitre mot sera une fois de plus ECONOMIE pour la simple raison que nous sommes dans  un marathon. Nous devons dépasser le court terme pour nous projeter dans le moyen et long terme.

A certains moments, tout gaspillage sera considéré comme un crime. Ce qui est normal et toléré en temps normal sera jugé indécent et inacceptable en cette période de crise.

Sans doute, la spiritualité pourra tempérer les instincts grégaires de quelques-uns en ce sens qu’elle fournit des ressources pour se transcender.

Mais il est clair que nous devons apprendre à nouveau à nous contenter de peu. Ne sachant pas de quoi demain sera fait.

Ainsi, à quelque chose malheur est bon. Le COVID 19 nous aura ramené à l’essentiel.

 

4 – Être disciplinés

Pour nous en sortir, nous sommes tenus de faire preuve également de responsabilité. L’esprit de responsabilité ici trouve sa matérialisation dans l’exécution quotidienne de l’ensemble des prescriptions qui, en nous sauvant la vie, nous permettent de réduire voire stopper la vitesse de propagation de ce virus.

Cette discipline est d’abord individuelle. Elle doit être de tous les instants. Elle est pour beaucoup d’entre nous inédite à bien des égards dans la mesure où elle va à contrecourant de nos habitudes. Nos habitudes hygiéniques. Nos habitudes sociales de palabrer, se toucher et s’embrasser.

L’impératif de se faire violence est là. Permanent, fatiguant mais nécessaire.

Cette discipline est aussi collective. Si nous ne sommes que quelques-uns à l’appliquer, le virus se propagera. Si la majorité applique les consignes, la minorité constitue pour cette dernière un danger.

On s’en rend compte, parce que nous sommes dans le même bateau, nous devons être exemplaires et amener les autres autour de nous à l’être. Être exemplaire au milieu d’un groupe d’insouciants revient au même : la persistance terrifiante du danger.

D’où l’obligation de faire société avec les autres.

Drôle de manière de faire société dans la mesure où, en restant au maximum chez soi et loin des autres, nous l’interpellons, pour sa vie et notre vie, à rester chez lui, loin de nous !

Comment transformer ce groupe difforme et complexe d’individus que nous sommes en être rationnels, prudents, prévenants et disciplinés ?

C’est à nous tous d’y répondre en commençant soi – même à ne pas être une partie du problème, mais une partie de la solution.

Ce faisant, nous voilà tous dans l’obligation de devenir, chacun à son niveau, des leaders.

 

5- Utiliser les synergies

Une autre attitude pour s’en sortir, il me semble, c’est d’être dans la synergie. Celle – ci, pour faire simple, peut être comprise comme l’ensemble des agencements de nos complémentarités qui produit le résultat suivant : 1+1 = 3. Le tout étant supérieur à la somme des parties.

Puisque soumis à l’impératif de nous dépasser pour espérer réussir, nous devons pouvoir travailler ensemble.

Travailler en valorisant les apports de tous et de toutes.

Travailler en mettant chacun dans la position qui lui permette d’apporter un plus au groupe.

Travailler en intégrant toutes les forces vives et en s’assurant que chacun est pris en charge par la stratégie et le plan collectifs.

La synergie entre jeunes et vieux, hommes et femmes, public et privé, pouvoir et opposition,…, est nécessaire.

L’opportunité est là.

Soyons à la hauteur.

Restons focalisés sur l’intérêt général. Donnons le meilleur et permettons aux autres de faire de même.

Ce n’est pas une exhortation mais un impératif.

 

6 – Être solidaires

La question des classes sociales est ici bousculée. Certes, ces classes existent et structurent la vie politique, économique, sociale et culturelle de notre pays. Mais parce que ce virus ne connait pas les pauvres et les riches, les cadres supérieurs des ouvriers, les travailleurs riches des travailleurs pauvres, il faudra faire face ensemble.

La question des tribus existe également et est déterminante dans nos interrelations diverses au quotidien. Mais dans le cas de cette crise, elle n’est pas pertinente. Le virus ne s’arrête pas aux frontières d’une tribu ou d’une communauté ethnique. Elle s’attaque à tout le monde. Ensemble, nous devons y faire face.

Nous pouvons accumuler des denrées alimentaires dans nos congélateurs et réfrigérateurs. Mais si, du fait d’un confinement strict et prolongé, nous devions avoir des gens condamnés à choisir entre la mort par le corona virus ou la mort par la faim, je crains que les réserves alimentaires des plus nantis ne soient réquisitionnées pour cas de force majeure : le besoin de manger pour vivre.

Nul n’est à l’abri et tous sommes sommés de contribuer à la sortie de crise. Le salut de chacun résidant dans la solidarité de tous.

 

7- Communiquer, communiquer, communiquer !

Enfin, dans cette période où la distanciation sociale, la réduction des mobilités et le confinement s’imposent un peu plus à nous chaque jour, il faut absolument communiquer.

Communiquer pour se dire la vérité sur l’ampleur des défis, l’étendue du désastre en cours, l’efficacité et les limites de ce qui, dans notre tâtonnement, est expérimenté.

Communiquer pour se rassurer, pour s’encourager, pour donner des nouvelles, pour se motiver et pour s’entraider.

Communiquer pour dire merci à ceux et celles qui, plus que nous, font des sacrifices et contribuent à la fin rapide de ce cauchemar.

Communiquer pour dire ce qui ne va pas, dans un esprit constructif, en vue de voir les bonnes mesures et les bonnes approches prises.

Communiquer pour proposer des mesures, des solutions et des idées susceptibles d’apporter des solutions.

Nous devons communiquer. Nous devons reprendre le fil du dialogue entre le haut et le bas, avec les pairs, dans le but de faire bloc et d’atteindre l’objectif.

Ne l’oublions pas, chez les chinois chez qui ce virus a commencé à faire des morts, le mot crise est représenté par deux symboles.

Le premier symbole veut dire MENACE : menace d’implosion, d’explosion, de destruction ou d’anéantissement.

Le second symbole veut dire OPPORTUNITE : opportunité de renaissance, de refondation et de progrès sur des bases plus saines.

Par ailleurs, dans la même optique, l’économiste Joseph Schumpeter considérait la croissance comme un processus de « DESTRUCTION CREATRICE ». Si nous lui empruntons le concept, à travers nos pensées, paroles et actions, nous pouvons faire de cette crise contre le CORONA VIRUS, un épisode de destruction créatrice pour notre pays.

Destruction des mauvaises habitudes d’incivisme, d’irresponsabilité, d’individualisme et d’incompétence.

Création d’une société différente par la qualité de la citoyenneté, des systèmes publics et des gouvernants qui les pilotent.

Le choix nous appartient, individuellement et collectivement.

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